Le système judiciaire est fondé sur la croyance que l’homme peut être tenu responsable de ses actes. Qu’il soit pauvre, malade, soumis à une épreuve ou sous la pression de ses émotions, il a en lui ce qu’il faut pour demeurer dans le droit chemin. Son aspiration à faire le bien et sa conscience lui apportent l’aide nécessaire pour éviter de prendre la route du crime. S’il n’utilise pas ces aides que la nature met à sa disposition et commet un crime, il en est tenu responsable.La psychiatrie est fille de la médecine. Elle a pour postulat de base que les troubles de comportements ont une origine biologique (par exemple, trop d’adrénaline, manque de sérotonine,etc.) Le recours à la médication est le moyen principal auquel elle fait appel pour aider les personnes troublées. Pour illustrer cette pensée à l’aide de chiffres, elle dirait que le corps est à 90% responsable des comportements délinquants et que la liberté humaine n’y est que pour 10%. Ceux qui restent dans le droit chemin ne doivent pas trop s’en attribuer le mérite. Ils ont simplement la chance d’avoir un corps mieux dosé.
La croyance à la base de la psychiatrie est à l’opposé de la croyance à la base du système judiciaire. Dans un cas l’homme est surtout un corps, dans l’autre il est avant tout une personne. Pourquoi accepter comme témoin expert quelqu’un qui analyse les comportements à partir d’une vision aussi réductrice et contraire au système judiciaire. En plus de jouir du statut de médecin, de parler un langage technique, d’avoir la crédibilité attachée à celui qui fréquente de près les personnes perturbées, il a tout pour impressionner. Mais que vaut l’expérience de celui qui part d’un postulat aussi discutable? Que fait-on de l’expérience de ceux qui fréquentent des personnes souffrant de ces mêmes maux, qui n’ont jamais commis de crimes. Ne font-il pas la preuve que la liberté humaine est plus forte que les penchants corporels? Les groupes d’aide à des personnes perturbées, par leur taux de réussite, ne font-ils pas la même preuve?
Je me demande dans quelle mesure la perte de confiance du public envers le système judiciaire ne vient pas en partie de la trop grande place que tiennent ces témoins experts? Pour eux, peu d’humains peuvent être tenus responsables de leurs crimes. Au lieu de construire des prisons, il faudrait bâtir des ailes psychiatriques; au lieu de réhabiliter les criminels, il faut les médicamenter. À quand des experts qui croient dans la responsabilité de l’humain. La personne perturbée n’a-t-elle pas au moins la liberté de demander de l’aide? Si elle n’a pas la liberté de ne pas ressentir ces pulsions elle a au moins la liberté d’en disposer selon son vouloir, de renoncer à les écouter.
La responsabilité d’une personne perturbée n’est certainement pas pleine et entière, mais de là à la disculper il y a une marge.
John White, Québec.