Le gouvernement du Québec se propose de mettre en place un test de dépistage de la trisomie 21. Dans les cas où le test se révélera positif les futurs parents seront confrontés à un choix difficile. Dotés de cette information, ils seront en mesure, disent les autorités, de faire un choix éclairé. Dotés de cette seule information, les parents risquent fort de se défaire de l’enfant. Le hic c’est qu’il n’existe pas de méthode pour faire entrer dans la balance l’immense amour que ces parents auront tout naturellement pour leur enfant.
Cet amour n’est pas dans sa forme complète à cette étape de la grossesse, il ne saurait faire défaut par la suite. Il est bien connu, que malade ou pas, les parents ne peuvent s’empêcher d’aimer leur enfant. Peut-on dans ce cas parler d’un choix éclairé lorsque les parents seront mis au fait des inconvénients d’avoir un enfant trisomique sans leur donner la possibilité de contrebalancer cette information par la connaissance de l’amour qu’ils auront normalement pour l’enfant et de ce que cet enfant apportera à la vie familiale? Les témoignages des parents d’enfants trisomiques s’accordent sur deux points : ils n’échangeraient jamais leur enfant pour un enfant bien portant et l’amour leur a donné la force nécessaire pour surmonter les difficultés inhérentes à cette situation. Le cœur a des raisons que la raison ignore.
Cet enfant apporte une contribution positive à la vie familiale. La première chose qui étonne au contact de l’enfant trisomique c’est que malgré son état, il est généralement de bonne-humeur, chaleureux et optimiste. Ainsi, sans recourir à la parole, il enseigne que le bonheur est simple. A ceux qui mettent l’accent sur la performance, la vie bien organisée et l’importance de la beauté, il est la preuve vivante du contraire.
Sa candeur, son absence de malice et le fait qu’il ouvre les bras indistinctement à tous, indiquent qu’une vie sans méchanceté est possible. Loin de lui les complots, la haine et l’agressivité toujours en éveil; il laisse ces comportements à d’autres.
À ceux qui se plaignent sans arrêt, qui se voient comme des éternels malchanceux, il est lui-même la démonstration qu’il est possible de souffrir sans se révolter. Son état lui cause plusieurs ennuis de santé qu’il supporte avec une égalité d’âme étonnante. C’est qu’il ne passe pas son temps à se dire : qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour que cela m’arrive, ni à soupeser les diverses conséquences de son mal. Il est bien connu que la révolte face au mal s’accroît en proportion de la taille de l’ego.
Bien sûr, avoir la charge d’un enfant trisomique n’est pas une sinécure. Responsables d’un enfant aussi démuni les parents s’affairent à le protéger, déploient des trésors de générosité. Tout en donnant beaucoup, ils reçoivent beaucoup en retour.
John White, Québec